La régulation couteuse et inégalitaire du marché américain
Il est difficile de parler d’un systèmes de santé unique aux Etats-Unis tant les situations varient (entre un Etat et un autre, entre la couverture maladie d’un riche et celle d’un pauvre, entre un praticien intègre à un réseau de soins et un praticien libéral).Trois tendances marquent cependant les évolutions américaines: l’impossibilité de contrôler l’augmentation des dépenses totales de santé, la régulation microéconomique croissante de l’offre de soins sous la pression des assureurs, l’impossibilité de garantir la santé à tous.
Les Américains dépensent presque deux fois plus pour leur santé que les Européens. Les tentatives de plafonnement des dépenses au cours des années 1970 par un blocage des prix et des salaires n’ont fait qu’accroitre l’activité (compensation du blocage des prix par l’augmentation du volume).La définition d’enveloppes globales attribuées aux différent secteurs de la santé a aussi échoué. Dés lors, les autorités publiques (fédérales et fédérées) se sont tournées vers le développement de la concurrence organisée entre réseaux de soins et financeurs pour réguler les dépenses de santé. Les assureurs privés (à but lucratif ou non) sont devenus les acteurs centraux du système appelés à négocier des tarifs, voire des enveloppes prédéfinies, avec les réseaux de soins, qui doivent en organiser la gestion en contrôlant l’activité des patients et des médecins qu’ils regroupent.
Sous la pression des assurances santé, les administration des réseaux intégrés de santé contrôlent de plus en plus l’organisation et les pratiques des fournisseurs de soins ( c’est pourquoi on parle de soins organisés: managed care).Les réseaux intégrés de santé( dont les plus connus et intégrés sont les Heath Maintenance Organisation-HMO, nés dans les années 1920) ont connus une croissance très forte au cours des années 1990: on passe de 40 millions d’Américains adhérents à un HMO en 1990 à100 millions en 1996, soit 38% de la population (Lambert, 2000,p.460). Plus largement, 70% de la population américaine est membre d’un réseau de soins. Pour les patients membres des HMO, la liberté de choix du médecin est restreinte aux médecins du réseau, il n’ y a pas d’avance de frais, les médecins généralistes jouent le rôle de médecin référent( gatekeeper); l’accès aux soins peut être limité, voire rationné. Les rémunérations. et pratiques médicales sont fortement contrôlées.
Les réseaux imposent aux praticiens qui en sont membres de respecter des normes de prescriptions, des protocoles des soins et des pratiques définies à travers des groupes de travail réunissant différents professionnels( conférences de consensus).
Les HMO retrouvent en fait les mécanismes de régulation propres aux systèmes nationaux de santé. La principale différence avec un systèmes national de santé tient dans la nature du régulateur: il s’agit d’un acteur marchand plutôt qu’étatique , qui passe des contrats avec les payeurs( employeurs ou assureurs privé mais aussi Etat pour Medicaid ou Medicare) avec les professions de santé et avec les patients ; cet acteur est pluriel et en concurrence(il doit garder ses financeurs, ses médecins et ses patient qui peuvent aller voir ailleurs), et il doit être rentable. Ce ne fut pas toujours le cas au cours des années 1990 pendant lesquelles une grave crise de rentabilité des assurance de santé a obligé les HMO à augmenter leurs primes. Acteurs privés (et non sociaux) les HMO fixent des niveaux de tarifs ou de prestations qui tiennent compte du niveau de risque de l’assuré , et ils parviennent à sélectionner les risque qu’il couvrant pas ou mal les personnes les plus démunies ou malades.
Le système américain de santé exclut de l’assurance une grande partie de la population, ce phénomène s’étant accru ces dernières années avec l’augmentation très forte des prime d’assurance( plus 78% entre 2001 et 2007).
Ainsi, en 2010 millions d’Américains étaient sans couverture d’assurance maladie( mais pas sans accès total au soin, les urgences médicales étant obligées de prendre en charge toute personne pour stabiliser sa situation).
Pendant longtemps, toutes les tentatives pour revenir sur cet état de fait et pour garantir à tous une couverture santé ont échoué. En1993 et 1994, Bill et Hilary Clinton ont présenté un projet de mise en place d’un système de santé pour tous qui n’a pas abouti. En 2003, George W. Bush a fait adopter une réforme prévoyant la prise en charge( partielle) des médicaments pour les personnes couvertes par Medicare. Avec l’augmentation des primes d’assurance maladie payées par les individus, le é nombre croissant de personnes non ou mal couverture santé fut un thème central de la campagne présidentielle de 2008.
Après une âpre lutte politique contre les républicains et les lobbies des assurances privées et de nombreux médecins, sans arriver à universaliser le système américains, Barak Obama est cependant parvenu à faire voter début 2010 une loi prévoyant de faciliter et subventionner l’accès aux assurance maladie 30 millions d’Américains. Il ne s’agit pas de mettre en place un système publique d’assurance maladie ( l’option publique, un temps prévue, a été rejetée), mais de rend obligatoire l’assurance maladie, de renforcer et réguler la concurrence entre les assurances. Ainsi , la réforme oblige tous les Américains à souscrire une assurance avant 2014 sous peine d’amende. Elle interdit aux compagnies d’assurance de refuser de couvrir quelqu’un en raison de ses antécédent médicaux, d’annuler la police d’un assuré parce qu’il est tombé malade, d’imposer des tarifs plus élevés aux femmes et aux personnes ayant des problèmes médicaux , de plafonner les dépenses totales contractées par un assuré tout au long de sa vie. Elle accorde une aide financière aux familles qui gagnent moins de 88000 dollars par an. La réforme crée dans chaque Etat une bourse des polices d’assurance pour promouvoir la concurrence et tenter ainsi de faire baisser les prix des primes d’assurance. Par ailleurs, le programme fédéral d’assurance maladie destiné aux pauvres va être élargi pour couvrir les personnes ayant des revenus allant jusqu’à 133% du seuil de pauvreté: 29327 dollars par an pour une famille de quatre.